Repenser le modèle de gouvernance pour assurer la pérennité de l’entreprise

En retrouvant son rôle de garant du contrat social, la gouvernance impulse la polytransition

Change in population abundance of species that rely on forests. 79% average decline 1970-2018.

Pour les organisations, la multiplicité des transitions se traduit en une multiplicité de nouvelles pressions (juridiques, sociétales ou encore du marché). Un rejet du modèle économique dirigé uniquement par la rentabilité financière (et d'un pouvoir qui serait concentré uniquement dans les mains des actionnaires) pousse les dirigeants à repenser leurs modèles économiques.

La gouvernance, représentée généralement par un Conseil d’Administration ou Conseil de Surveillance, est le lieu de prise de décision stratégique et de répartition des pouvoirs entre les acteurs et les instances de l’entreprise. Cet organe, chargé de la maîtrise de la stratégie sur le long terme, est naturellement le levier central des changements organisationnels. C’est lui qui permettra aux équipes d’impulser la transformation en réponse à la polytransition.

Certains experts considèrent que, pour assurer la performance de l’entreprise dans la transition, la gouvernance doit, d’une part, adopter une posture plus équilibrée et, d’autre part, une vision plus holistique, prenant en considération toutes les composantes qui impactent l’organisation bien sûr, mais aussi la société et l’environnement. Plusieurs pistes de solutions systémiques sont possibles, permettant la diversité au sein des Conseils. Cette diversité peut, elle-même, prendre plusieurs formes.

Inclusivité pour une résilience sur le long terme

Une première manière d’amener de la diversité au sein des organes de gouvernance se pose en matière de représentation des intérêts. Un modèle possible est celui de la codétermination, qui vise à équilibrer et prendre en compte les demandes de deux parties prenantes constituantes puissantes des entreprises : les actionnaires et salariés.

La gouvernance opère un rôle de 'gardiens du temple'. C’est elle qui veille sur ce que l’entreprise a de plus sacré : les engagements pris envers toutes ses parties prenantes, dont seules la confiance et l’implication lui assurent une longue vie.

La codétermination permet l’expression du regard interne des salariés, ainsi qu’une diversification des perspectives et des regards critiques (ou constructifs). Ce monde facetté, qui reflète enfin toute l’entreprise (l’entreprise voulue et l’entreprise vécue), enrichit le processus de décisions du Conseil et facilite l’acceptation des décisions. Il renforce aussi la responsabilité collective, découlant de l’attachement des collaborateurs à l'histoire de l’entreprise, et à sa continuité.

Une meilleure représentation sociale passera également par d’autres critères tels que le genre ou encore l’origine, dont la représentation a été accélérée suite aux lois de sécurisation de l’emploi en 2013, et pour le dialogue et l’emploi en 2015. Cette évolution vers une gouvernance plus inclusive dans les entreprises s'avère bénéfique pour la résilience organisationnelle et la création de valeur à long terme.

Socle décisionnel commun

Pour permettre aux organes de gouvernance de fixer une direction claire qui respecte les limites planétaires et la justice sociale, l’évolution de la composition du Conseil et la montée en compétences des administrateurs est une autre nécessité.

Face à la complexité et la diversité des thèmes à l’agenda des Conseils d’Administration (Stratégie, ESG, opérations…), les formations, notamment aux enjeux de transitions écologiques et solidaires forment un socle minimum. Et pour certains administrateurs salariés, des formations en science de gestion et finance leur permettent d’exercer pleinement leur mandat. Aucune décision qui engage la pérennité de l’entreprise sur le long terme ne peut plus être prise sans une compréhension du changement climatique, de l’impact social des opérations, et des inégalités sociales (de genre et autres) que l’entreprise peut engendrer, ou, au contraire, qu’elle contribue à résorber.

De la responsabilité à l’utilité sociale

L’extension du périmètre de responsabilité de l’entreprise vis-a-vis des conséquences de son activité reste la grande question. S’interroger sur la place qu’elles occupent au sein de la société devient donc une nécessité.

Pour cela, les options se multiplient. Les entreprises peuvent prendre le chemin de la Société à Mission (en se fixant des objectifs sociaux et environnementaux) ou encore s'inspirer des entreprises qui poursuivent déjà une utilité sociale (contribuer à la réduction des inégalités, la protection des populations vulnérables, l’éducation à la citoyenneté, le renforcement du lien social et/ou la cohésion territoriale). La notion de raison d’être, introduite par la loi Pacte en 2019, est un moyen d’exprimer clairement le rôle de l’entreprise vis-à-vis de toutes ses parties prenantes. Elle pourra servir de guide dans la prise de décisions stratégiques sur le long terme, permettant l’équilibre face aux critères financiers de court-terme, qui ne peuvent servir de boussole saine.

L’équilibre juste du pouvoir de décision

Pour devenir un pivot de transformation, les conseils d'administration doivent s’ouvrir à d’autres parties prenantes légitimes et assurer une répartition équilibrée des pouvoirs de décisions. Cet équilibre rend possible leur rôle de garant du “contrat social” implicite entre l’entreprise et ses parties prenantes (internes comme externes). Ce contrat social est l’accord entre l’entreprise et la société, formalisant ainsi l’utilité de l’une pour l’autre, et donc la légitimité de leur coexistence.

Dans un contexte de polytransition, où normes et attentes changent, la gouvernance d’entreprise opère un rôle de “gardiens du temple". C’est elle qui veille sur ce que l’entreprise a de plus sacré : les engagements pris envers toutes ses parties prenantes, dont seules la confiance et l’implication lui assurent une longue vie.

Eranos
Eranos est un cabinet de conseil en stratégie fondé en 2005 et spécialisé dans la transformation par la culture. Nous utilisons les sciences sociales pour aider les organisations à se préparer aux évolutions culturelles et stratégiques, à concevoir des stratégies basées sur la valeur et à impliquer leurs parties prenantes dans la réalisation de ces objectifs.

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— Armand Hatchuel