Quel rôle l’entreprise aura-t-elle demain ?

Les entreprises doivent réaliser que, de par la production d'offres, de produits, de biens et de services, elles modifient la vie dans laquelle les gens évoluent. Leur avenir dépend de cette prise de conscience qu'elles sont des agents de la civilisation.

Quel rôle aura l'entreprise demain ?

La raison pour laquelle on se pose cette question c'est parce que les entreprises sont chahutées. Pour une raison simple c'est que depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, graduellement, les entreprises ont pris un rôle qui traditionnellement été occupé par d'autres agents de la civilisation comme les Etats, la famille, ou les religions.

L'avenir des entreprises est de prendre conscience de cette fonction d'agent de civilisation, et de la responsabilité qui leur incombe

On réalise aujourd'hui que les entreprises ont la capacité d'agir sur le territoire, d'agir sur la vie quotidienne des gens, d'agir sur les moeurs, sur les usages, sur les peurs, sur les choses les plus intimes et les plus quotidiennes de la société civile. Cela veut dire que les entreprises doivent réaliser que, de par la production d'offres, de produits, de biens et de services, elles modifient la vie dans laquelle les gens évoluent. A l'extérieur, pour les consommateurs, mais aussi à l'intérieur, chez les collaborateurs.

Donc l'avenir des entreprises est de prendre conscience de cette fonction d'agent de civilisation, et de la responsabilité qui incombe aux acteurs de l'entreprise.

Quelles préconisations pour aider les chefs d'entreprise à passer le cap ?

Tout d'abord je voudrais rassurer en disant qu'il n'y a pas de "cap". Ce n'est pas une crête, avec une bascule de l'autre côté. C'est en fait une longue ligne continue avec des petits mouvements.

Les entreprises doivent réaliser que, de par la production d'offres, de produits, de biens et de services, elles modifient la vie dans laquelle les gens évoluent.

Traditionnellement, un entrepreneur ou un patron se construisait sous une forme de direction ou du dirigeant qui devait être inspirant, tirer derrière lui l'ensemble des forces motrices de l'entreprise. Aujourd'hui on se rend compte que pour que des utopies qui sont construites à l'intérieur des entreprises puissent prendre place, il faut que les entrepreneurs aient le rôle plutôt d'un totem, c'est-à-dire une force centripète autour de laquelle vont graviter, se créer, apparaître des innovations ascendantes, des opportunités, des capacités de produire. Clair Michalon, qui est anthropologue, a appelé cela un "centre vide".

Il faut donc pour les chefs d'entreprise apprendre a délaisser cette forme étrange de l'égo, et à reprendre cette capacité étrange qui, en tant que centre vide, permet d'agréger et de faire que d'autres énergies venant d'ailleurs puissent tout simplement sourdre et croître.

Michaël V. Dandrieux
Michaël V. Dandrieux, Ph.D., est sociologue et co-fondateur d'Eranos. Depuis 20 ans, il accompagne les dirigeants de toutes les industries : futur des soins avec Pierre Fabre, transition de Chloé vers une gouvernance par les parties prenantes, engagement des travailleurs chez Nexans, culture d'Air France face au COVID, valeurs de convivialité de Pernod Ricard, et confiance des femmes avec L'Oréal USA. Issu de la tradition de la sociologie de l'imaginaire, il enseigne à Sciences Po Paris au sein de l'Ecole du Management et de l'Impact et siège dans plusieurs Conseils d'Administration et Comités de Mission.

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Si nous commençons, chacun pour notre compte, à poser de telles questions sur tous les aspects de notre système de production, nous devenons d’efficaces interrupteurs de globalisation — aussi efficaces, millions que nous sommes, que le fameux coronavirus dans sa façon bien à lui de globaliser la planète.
— Bruno Latour