L'inclusion et la diversité, bien que souvent liées au sein des projets d'intégration de profils variés en entreprise, ne sont ni synonymes ni mutuellement exclusives. La diversité, originaire du latin diversitas, évoque la variété, la différence, voire la divergence. L'inclusion, issue du latin inclusio, signifie l'introduction ou l'intégration d'un élément dans un ensemble. Ainsi, l'entreprise, faisant partie intégrante de la société plus vaste, a le rôle d'intégrer la diversité par le biais de l'inclusion.
Penser l’inclusion et la diversité de façon conjointe
La diversité est un état de fait quand l’inclusion est le résultat d’une action. Une attention toute particulière doit être accordée à la compréhension et mise en application de la diversité avant d’espérer enclencher un processus d’inclusion optimal. En effet, penser l’inclusion sans penser ce qu’est la diversité, c’est prendre le risque de produire l’effet contraire de ce que l’on souhaitait, en marginalisant davantage des profils dont on a pas su percevoir les spécificités et les entrecroisements.
A l’inverse, penser la diversité sans penser l’inclusion, c’est prendre le risque d’adhérer à un projet de façade uniquement, réduisant la diversité à de la poudre aux yeux (token en anglais), en employant par exemple une personne issue d’une minorité pour se prévaloir des critiques et laisser penser que tout le monde est traité à la même enseigne et dispose des mêmes opportunités.
Une problématique qui traverse l’entreprise
L'inclusion au travail ne se limite pas à un domaine isolé, mais interagit avec d'autres aspects du monde professionnel. En plus de la responsabilité sociale des entreprises (RSE), l'inclusion peut également influencer la réflexion sur le leadership. Par exemple, une étude combinant la gestion des ressources humaines, la performance, la diversité et l'inclusion a montré comment la diversité favorise l'engagement des employés, notamment grâce à un leadership transformationnel (Avolio, Bass & Yung).
Les managers peuvent jouer un rôle clé en promouvant une culture organisationnelle inclusive. Même si l’inclusion est une problématique souvent reléguée au niveau des services des ressources humaines, le recrutement n’est pas le seul moment où l’inclusion doit être prise en compte et les enjeux de l’inclusion ne sont pas l’apanage d’un seul organe des entreprises. Les managers gagnent à introduire ces problématiques dans leur façon même d’exercer leur leadership.
L’inclusion comme feuille de route
Aujourd’hui, l’inclusion dans les entreprises consiste en une tendance à concevoir chaque facteur discriminant de façon isolée et distincte des autres. Ainsi, le genre et le handicap ne vont pas être pensés de façon simultanée mais de façon cloisonnée. La difficulté à penser l’interconnexion de ces différentes dimensions qui fondent pourtant l’identité des individus entrave la création d’un modèle d’inclusion lisible et efficace.
Nous avons aussi tendance à nous concentrer uniquement sur des caractéristiques visibles (comme le genre ou la couleur de peau) pour promouvoir la diversité, négligeant ainsi des aspects plus imperceptibles et complexes, liés à l'expérience personnelle. L'attention portée à ces expériences invisibles est essentielle pour développer un modèle d'inclusion et d’implémentation de diversité en entreprise, impliquant l'écoute, la prise en compte des vécus et particularités, et la réactivité aux besoins des individus aux parcours divers.
L’inclusion est donc un processus, qui ne s’arrête pas à une diversité de façade lors du recrutement. Il n’est pas question seulement d’intégrer des personnes, mais également d’intégrer des pratiques inclusives de façon permanente, ce qui nécessite une vigilance et des efforts renouvelés. L’inclusion est dynamique, et n’est pas un mythe quant à sa faculté de développement des entreprises tant elle vient créer ou renforcer une réelle culture d'entreprise. L’inclusion et la diversité se concrétisent perpétuellement.
Faire de l’inclusion une réalité
Certaines entreprises, comme le groupe américain JLL spécialisé dans le conseil en immobilier d’entreprise, ont pris des mesures concrètes pour promouvoir l'inclusion par l’espace. En utilisant le design inclusif pour créer des espaces de travail adaptés à tous, JLL a réussi à générer des environnements "safe & healthy" qui ont un impact positif sur la productivité des employés et les incitent à s'engager davantage dans l'entreprise. Leur engagement envers la sécurité, la santé et le bien-être des employés, même à travers leurs espaces de travail, leur a valu plusieurs distinctions, dont celle d'être reconnu comme l'un des meilleurs employeurs pour l'inclusion des personnes handicapées par le Disability Equality Index, et l'un des meilleurs employeurs pour la diversité selon Forbes.
Mais ce n’est pas simple. L'étude comparative de Laure Berini sur les pratiques de diversité en entreprise aux États-Unis et en France met en évidence l’ampleur des défis auxquels sont confrontés les “gestionnaires de la diversité”. Ces professionnels, chargés de promouvoir la diversité au sein des entreprises, se heurtent à des contraintes budgétaires qui limitent leurs ambitions. Les raisons de ces contraintes varient d'un pays à l'autre, soulignant l'importance du contexte historique et sociologique dans la mise en œuvre de mesures efficaces. L'étude met en lumière la nature systémique de ces initiatives inclusives, nécessitant une approche globale et une intégration à tous les niveaux de l'entreprise. Il est donc enthousiasmant de constater que nous avons certaines clefs en main, il s’agit désormais de se les approprier et de les mettre en pratique.
Dos and don'ts
Les sciences sociales, comme démontré dans l'ouvrage “Getting to Diversity: What Works and What Doesn’t” (Kalev & Dobbin), offrent des insights sur l’efficacité des approches en matière de diversité. Les auteurs révèlent que les programmes de diversité n'améliorent pas nécessairement la diversité, et que les démarches d’inclusion sont parfois utilisées principalement comme des boucliers légaux par les entreprises. En mettant en évidence les biais et les utilisations trompeuses de diverses pratiques (comme les tests d'embauche, les programmes de formation sur la diversité, l'évaluation des performances et les procédures de réclamation), les auteurs soulignent qu'elles ne constituent pas une solution miracle pour éliminer les préjugés et les stéréotypes des collaborateurs et managers, qui perdurent malgré ces efforts.
Cependant, de meilleurs résultats peuvent être obtenus en se détournant des mesures de contrôle traditionnelles. Cela nécessite d'admettre que les approches antérieures n'étaient pas efficaces et de promouvoir des pratiques de démocratisation des carrières telles que le mentorat, l'implication des managers et la collaboration entre groupes divers ayant des objectifs communs. Bien que l'étude concerne 829 entreprises américaines, il est possible d’imaginer la transposition de certaines des conclusions au contexte français. Bonne nouvelle; la Fondation Agir Contre l’Exclusion et l’Association Française des Managers de la Diversité (AFMD) ont conçu le guide "Discriminations liées à l’origine : Prévenir et agir dans le monde du travail" identifiant et mettant en lumière différentes pistes d’action actionnables dans le contexte français.